Vous êtes ici
L'usine de Bouxwiller
Le bleu des façades des maisons du pays de Hanau provenait de Bouxwiller. Pendant les XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, les fabriques de cobalt contribuèrent à l'essor économique de l'Alsace, notamment à Sainte-Marie et à Bouxwiller. L'usine de Bouxwiller fabriquait de l'alun, du vitriol, de l'ammoniaque et marginalement du bleu de Prusse à partir des minéraux extraits du Bastberg. Le bleu de Prusse était vendu aux usines textiles de Mulhouse. Créée le 1e août 1818, l'administration des mines de Bouxwiller devint dans la seconde moitié du XIXe siècle une des principales entreprises françaises de produits chimiques. En 1850, avec 370 salariés, elle double ses effectifs par rapport à 1825 et se place au septième rang des établissements manufacturiers du Bas-Rhin. Le rapport général sur la situation du canton de Bouxwiller pendant l'année 1854 dit : A part l'établissement des mines et de sa dépendance la Raïd, la ville n'offre de remarquable que la place publique dite Schlosshof3. En 1821, la fabrique de produits chimiques de la Reidt installe un atelier de fabrication de bleu de Prusse au Holzhof, la maison des administrateurs des mines. Le comble de l'abomination avait été l'installation d'un important atelier de fabrication de bleu de Prusse dans la cave4 et dont une série de bâtiments du type industriel était dominée par un imposante cheminée. On avait voulu placer sous surveillance immédiate d'un directeur une production originale dont le secret devait être gardé. Mais la couleur envahissait tout, les murs étaient bleus, la peau des ouvriers était teintée, sans parler de leurs vêtements. C'étaient « les Bloï manner »5 connus dans toute le ville6.
L'intérêt porté à la condition ouvrière par Ch. H. Schattenmann, directeur de 1823 à 1869, a profité aux conditions de vie des familles et au développement de l'entreprise. Animé par sa foi protestante, qui le fait penser que les inégalités sociales sont le fruit de la volonté divine et qu'il est présomptueux de désirer renverser l'ordre établi7, il met en place une organisation de protection sociale d'avant-garde pour remédier quelque peu aux conditions de travail dont le caractère éprouvant, dans les mines et les usines, est reconnue dès 1828. L'activité des mines occasionne des dommages aux constructions et aux cultures et, plus encore, présente des effets néfastes pour la santé des ouvriers. D. Deiss, le premier, dans sa thèse de médecine présentée en 1828, reconnaît que l'effleurement du minerai exalte une odeur et une fumée désagréables. Environ cent tonnes de lignite sont exposées à l'efflorescence. Chacun de ces tas est de 30 mètres de long, de 10 mètres de large et de 3 mètres de hauteur. Par action de l'oxygène sur le souffre, le fer et l'alumine du charbon, l'efflorescence forme des cristaux de vitriol – aujourd'hui appelé sulfate de fer – et de l'alumine. Pour Deiss, la grande quantité d'acide sulfurique qui se dégage dans cette opération n'altère pas l'atmosphère au point de la rendre nuisible à la santé8. Dès 1908 les mines ont connu quelques difficultés qui ont entraîné l'intervention des banques, et notamment de la banque d'Alsace et de Lorraine9.