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Artisanat et commerce en bordure de la rue

La rue principale. Photo Marc HeiligLa rue principale donne l'orientation générale : les rues secondaires, sans suivre un quadrillage rigoureux, lui restent néanmoins à peu près parallèles ou perpendiculaires. Les bâtiments qui la bordent se développent en profondeur. Leur caractère artisanal et commercial est fortement marqué, ce qui se comprend parfaitement si l'on songe que la traversée du bourg se faisait par là. A la fin du Ie s. ap. J.-C, on édifia, vraisemblablement des deux côtés6, un portique à piliers sous lequel ouvraient des boutiques. On y proposait ce que l'on fabriquait dans les ateliers situés à l'arrière.

A l'est, les archéologues ont dégagé une rangée de huit bâtiments qui présentent des caractéristiques semblables. Construites au IIe s., ce sont des constructions rectangulaires très allongées7, qui donnent sur la rue par un petit côté et sont souvent séparées par une venelle8. Certaines ont des murs de terre et de bois sur un solin de pierres, d'autres sont construites en dur9. Le plan intérieur comprend d'ordinaire une grande salle en façade à laquelle sont accolées des pièces d'habitation. Au delà s'étendait un espace ouvert10, que l'on a parfois utilisé pour installer des dépendances : ainsi, dans les bâtiments 5 et 8, celles-ci s'organisent autour d'une cour empierrée. Parmi les aménagements principaux, on notera des caves11 et des installations de chauffage par hypocauste12, mais d'autres aussi qui tiennent à la fonction de ces bâtiments : fours, puits, silos13... S'il semble bien qu'il n'y ait plus d'autres constructions à l'est de ces maisons, les fouilles futures devraient en dégager d'autres d'organisation semblable au nord et au sud de la zone fouillée ; on est sûr aussi qu'il y a des bâtiments en vis-à-vis par delà la rue.

Fours à coupole pour la cuisson des aliments. Photo Marc Heilig Un peu plus au nord, l'autre côté de la voie est occupé dès les années 40/50 ap. J.-C. par une rangée de bâtiments en bois. La pierre apparaît peu à peu, soit pour des solins qui supportent des murs en terre et en bois, soit pour des murs en opus caementicium14 à parements en petit appareil. Un incendie, à la fin du Ie s., permet de reconstruire ce quartier rapidement. Il atteint sa plus grande extension à la fin du IIIe s. : les maisons sont alors transformées et agrandies.
Elles sont différentes de celles du quartier est. Le caractère d'habitat y est plus marqué quoique l'aspect économique reste bien présent. On trouve de nombreuses traces de métallurgie du fer et du bronze : fours et bas-fourneaux, résidus de métal, outils... Dans trois bâtiments, des fours hémisphériques, disposés par deux pour assurer un fonctionnement continu, servaient à la cuisson d'aliments, de la boulangerie en particulier. Dans les caves, fréquentes et de bonne taille, on stockait diverses marchandises. Certaines venaient de contrées éloignées car le commerce était fort actif dans la région.

  • 6. L'existence d'un portique est assurée à l'ouest, mais seulement supposée à l'est. C’est une façon fréquente d’aménager les bords d’une route lorsqu’elle travers une agglomération. Les fouilles du vicus de Dalheim-Ricciacum, au Luxembourg, ont révélé le même dispositif le long de la voie Agrippa entre Metz et Trèves. Cf. KRIER Jean, Le vicus romain de Dalheim, MNHA 2010.
  • 7. Le bâtiment 1, par exemple, fait une quarantaine de mètres de long sur 10,5 de large.
  • 8. Entre les bâtiments 1 et 2, la venelle a 0,5 m de large. A partir du bâtiment 5, il semble qu'on ait ménagé régulièrement un espace entre les constructions : entre les bâtiments 7 et 8, il a 1,6 m de large.
  • 9. Les bâtiments 1 à 4 appartiennent à la première catégorie, les bâtiments 4 à 8 à la seconde.
  • 10. L'arrière des bâtiments 2, 3 et 4 donne directement sur cet espace ouvert, où l'on a retrouvé 3 puits en pierres sèches.
  • 11. Certaines de ces caves sont soigneusement réalisées, avec des soupiraux et des niches voûtées en cul-de-four.
  • 12. Il faut dire un mot sur cet ingénieux mode de chauffage. La salle chauffée dispose d'un sous-sol où de petits piliers montés en briques soutiennent la dalle du sol. Dalle et piliers sont chauffés par de l'air chaud qu'on fait entrer dans cet espace à partir d'un foyer attenant (praefurnium). Il s'agit donc d'un chauffage par le sol, mais on pouvait l'améliorer en faisant circuler l'air chaud dans des tubulures placées dans les murs. L'aménagement de salles chauffées témoigne de amélioration du niveau de vie. Le visiteur observera mieux encore ce dispositif dans les thermes, où il est porté à son expression la plus élaborée.
  • 13. Dans la grande salle du bâtiment 5 a été retrouvé un tas de céréales carbonisées.
  • 14. Mélange de mortier et de moellons.

Référence à citer

Marc Heilig, Bliesbruck, une ville à l'époque romaine, archeographe, 2011. https://www.archeographe.net/Bliesbruck_ville_a_l_epoque_romaine