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La guerre de Hollande (1672–1678).

La plus cruelle pour Haguenau.Pour briser la suprématie commerciale des Hollandais, Louis XIV engage une guerre qui l'oppose à une forte coalition formée par la Hollande, l'Autriche et l'Espagne. L'Electeur de Brandebourg, à la tête de l'armée impériale, viendra envahir l'Alsace dès novembre 1672. En 1673, Louis XIV fait démanteler de nombreux châteaux médiévaux afin d'assurer la frontière du Rhin en Alsace. Pour faire face à l'indépendance des villes de la Décapole et craignant que l'ennemi ne s'y retranche, il fait éventrer leurs fortifications, notamment celles de Haguenau, et en fait vider les fossés1. Le 13 juin 1674, Turenne arrive à Haguenau et fait réparer les fortifications2. Document d'accompagnement de la médaille commémorant la levée du siège de 1675. En août 1675, les armées impériales mettent le siège devant la ville, la bombardent le 20 mais quittent le siège dans la nuit du 21 au 223. Les fortifications sont démolies la même année. Une médaille est frappée en commémoration de la levée de ce siège : le texte d'accompagnement dit que la place était assez mal fortifiée et que la levée du siège d'Haguenau sauva l'Alsace. Médaille commémorant la levée du siège de 1675. En 1676, le baron de Montclar, gouverneur de la province d'Alsace, fait fortifier quelques villes alsaciennes ; on travaille à celles de Haguenau4. Puis il reçoit l'ordre d'en démanteler d'autres qui auraient pu servir de point d'appui aux Impériaux5.

Les misères de la guerre.

Louvois applique la stratégie de la terre brûlée6 qu'il étend tout le long de la rive gauche du Rhin. Dans sa dépêche du 22 décembre 1676, Louis XIV7 donne l'ordre suivant : ayant résolu de faire razer la ville de Haguenau, (…) qu'il n'en reste aucun vestige, non plus que des écluses, et tout autre chose servant à la fortification, (…) en conservant seulement les redoutes pour les faire sauter le jour que l'on partira, et de razer en même temps les redoutes et les dehors de terre. En janvier 1677, suite à cet ordre, Louvois décide de détruire Haguenau. Le baron de Montclar fait miner et sauter les fortifications8, renverser les tours et les murs par 400 soldats ; le château, les quarante tours et les huit rondelles sont détruits9. A nouveau, le 16 septembre, le Maréchal de Créqui ordonne de mettre à feu les édifices restant10.
On imagine l'état des lieux. La ville est alors ruinée financièrement, les deux tiers des constructions sont délabrées ou complètement démolies. Après ces évènements, la population de la ville ne comptait plus que 450 personnes. Dès 1677, Montclar demande l'autorisation de reconstruire les murailles de la ville11, ce qui sera autorisé durant l'été 1678. Le financement en est assuré par une coupe exceptionnelle de bois dans la forêt12. Les brèches sont remuraillées et l'enceinte quelque peu réaménagée, avec moins de tours que précédemment13. Elle est cependant suffisante pour décourager les voleurs et délimiter la zone de perception des impôts. Mais la reconstruction ne redémarra réellement qu'à partir de 1714, après la guerre de Succession d'Espagne.
Les traités de Nimègue mirent fin à cette guerre, en 1678 avec les Pays Bas et l'Espagne puis, en 1679, avec l'empereur. Haguenau, ainsi que les autres villes de la Décapole, seront déclarées comme unies et incorporées à perpétuité à la France. Le 18 octobre 1685, Louis XIV révoque l'Edit de tolérance signé à Nantes en 1598 par son grand-père Henri IV. Le nouvel édit s'applique à l'ensemble du royaume sauf à l'Alsace récemment annexée.

d - La guerre de la Ligue d'Augsbourg (1688–1697).

Celle qui fut fatale au Palatinat.Ce conflit, parfois nommé Guerre d'Orléans14, oppose la coalition des puissances européennes, Angleterre, Autriche, Espagne, Hollande et Suède, à la politique agressive de Louis XIV, marquée notamment par l'annexion de Strasbourg en pleine paix. Pour couvrir l'Alsace pendant qu'on termine la forteresse de Landau, Louvois reconduit la stratégie de la terre brûlée en 168915. Il fait démolir plus de 400 villages et villes, dont Heidelberg, Mannheim, Oppenheim, Spire et Worms16, ainsi que de nombreux châteaux. La guerre se termine par la paix de Rijswijk17, qui met un terme à la tentative d'hégémonie française en Europe : la France doit rendre ses acquisitions postérieures à la Paix de Nimègue et renoncer à toutes les fortifications de la rive droite du Rhin, mais elle conserve Strasbourg. Après ce traité, le cours du Grand Rhin devient la frontière politique et militaire entre la France et l'Empire. Les ruines du château de Heidelberg.

  • 1. Guerber I, p. 571. Klélé p. 214. Ce qui montre que, selon les besoins de défense du moment, on pouvait remplir ou vider les fossés grâce à des écluses.
  • 2. AMH BB 93. Klélé, Die Reichsstadt Hagenau, p.135. Guerber 1 p 312
  • 3. Grasser p. 116.
  • 4. AMH. CC 296.
  • 5. Klélé, Die Reichsstadt Hagenau, p. 210.
  • 6. Übel, Die Festungen an der Keich und Lauter. p. 65.
  • 7. Klélé, p. 210.
  • 8. Elles se composent d'un fossé et d'un mur de terre mal flanqué.
  • 9. Guerber p. 315 et 572. Klélé, Die Reichsstadt Hagenau, p. 215. Hanauer, Etudes haguenoviennes 1933-37, p. 62.
  • 10. Toutes les portes et les tours à l'intérieur de la ville n'ont pas été détruites comme on le voit sur les gravures de Merian, en particulier les portes des Chevaliers et des Pêcheurs qui subsistent encore. Détruire cette dernière aurait été un non-sens car les débris auraient empêché la navigation sur la Moder, utile aux armées.
  • 11. AMH. BB95.
  • 12. Le roi donne l'autorisation d'abattre 1000 chênes. DD32 – 1680/1687.
  • 13. Environ une dizaine d'après les plans.
  • 14. Guerre de succession du Palatinat. Der Pfälzische Erbfolgekrieg.
  • 15. Bruléz le Palatinat !
  • 16. Übel, Die Festungen an Queich und Lauter, p. 65.
  • 17. En Hollande.