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Vauban et l'Alsace après 1648.

En 1662, Louis XIV crée le Commissariat des fortifications. Le jeune ingénieur Vauban reconnaît la plupart des places des Flandres aux Alpes, en passant par l'Alsace où il fait son premier séjour entre 1663 et 1678 à Brisach et à Colmar. A partir du traité de Nimègue (1679) et jusqu'au début du XVIIIe siècle, aidé des Ingénieurs du Roy1, il réalise la défense systématique des frontières du nord-est, de Belfort à Landau et Phalsbourg.

Entre 1668 et 1702, Vauban rénove plus de 300 places fortes anciennes, parmi lesquelles on trouve Haguenau, et en crée de toutes pièces plus de 30 nouvelles. Il veut cependant en réduire le nombre pour ne conserver que les plus fortes. Je ne suis point pour le grand nombre de places ; nous n'en avons que trop, et plût à Dieu que nous en eussions moins de moitié, qu'elles fussent en bon état et le pré carré2 comme je le désirerais, le Roy serait en pouvoir de se moquer de ses ennemis et de rendre, en se jouant, leurs efforts inutiles.

Suite à ses analyses, il remanie La Petite-Pierre, l'une des plus petites villes du monde et la plus bizarrement située sur un roc escarpé aux trois quarts de son circuit, Bitche (1681) et le Lichtenberg, développe Phalsbourg (1680), Strasbourg (1681) et Kehl (1682), Sélestat (1679-91) et Belfort (1698), construit Philippsbourg sur le Rhin3, la tête de pont de Huningue (1679-82), Fort-Louis (1686-87)4, reconstruit Landau (1688) et finalement construit son chef-d'œuvre, Neuf-Brisach (1698). La fortification de l'Alsace était ainsi terminée ; jusqu'en 1789, elle ne devait plus changer que sur des détails, notamment à Haguenau.

Disposer d'une place forte, dit-il, c'est contrôler un carrefour essentiel, une source de ravitaillement et un casernement. A côté des grands aménagements de places, il réalise des postes5, c'est à dire de petites forteresses capables de résister à une attaque mais non à un siège en règle. Pendant la guerre de succession d'Espagne (1701-1714), Haguenau deviendra place, Lauterbourg et Wissembourg des postes.
Dans sa démarche, qui consiste à adapter sa tactique au terrain, il analyse celui-ci de quatre points de vue : la situation générale par rapport à l'ensemble de la région concernée, le site local, la géologie et la nature du sol. Il fait un raisonnement complet et examine le binôme moyens-terrain en fonction de diverses hypothèses de manœuvre des armées de campagne : que veut l'armée française ? que veut et peut le camp adverse .La position de Haguenau était ambiguë mais, après de nombreuses remises en cause, la ville finit par compter parmi les neuf places de la frontière moderne est du pré carré. Rarement cité, Haguenau figure en définitive au recueil de 17866, et même en première page, des PLANS DES PRINCIPALES PLACES DE GUERRE ET VILLES MARITIMES FRONTIERES DU ROYAUME DE FRANCE, Phalsbourg, Hagueneau7, Landau, Fort-Louis du Rhin, Strasbourg, Schelestat, Neuf Brisach, Huningue et Belfort.

Plans des principales places de guerre et villes maritimes frontières du Royaume de France.Plans des principales places de guerre et villes maritimes frontières du Royaume de France.Plans des principales places de guerre et villes maritimes frontières du Royaume de France.Plans des principales places de guerre et villes maritimes frontières du Royaume de France.Plans des principales places de guerre et villes maritimes frontières du Royaume de France.

  • 1. En 1685 il y en avait 275 ; en 1683, on en comptait déjà 24 en Alsace sous le commandement de Tarade.
  • 2. La politique du pré carré est élaborée par Vauban avec Louvois en 1673 ; elle consiste à édifier un système de défense cohérent avec une double ligne de places fortes destinées à verrouiller les passages les plus vulnérables.
  • 3. En Allemagne.
  • 4. Le 6 janvier 1687, il y pose personnellement la première pierre.
  • 5. Dans les textes consultés, la distinction entre place et poste n'est pas toujours très nette.
  • 6. AMH Gb 2.164.}
  • 7. Sic.